top of page
Rechercher
  • Photo du rédacteurTacteon

Partage formel

René Char, Aristote et le reste


« Le poète doit tenir la balance égale entre le monde physique de la veille et l’aisance redoutable du sommeil, les lignes de la connaissance dans lesquelles il couche le corps subtil du poème, allant indistinctement de l’un à l’autre de ces états différents de la vie. »

R. Char Partage formel



Un dessin et ce qui peut ne pas avoir-lieu.

Il revient à chacun(e) de ne pas céder sur l'espace. Les noms qu'on donne sont de fortune. Ce à quoi nous devons donner abri ce n'est ni à la veille, ni au sommeil, mais à l'intervalle. C'est depuis l'inégalité tendu des cordes que le son prend élan. Traces négligeables du présent.

C'est dans l’équivoque du dessin et du lieu que le dessein reprend l’offrande. Espace qui joue, trait en passant. Le dessin s'entend quand il cesse, c'est notre propre œuvrer qui le détache de son support, c'est alors : « L'inextinguible réel incréé ». Accès, passage, séjour. L'accord tacite, comme veiller jusqu'à aube. Aubade. Comme tenir jusqu'au pli dans le creux des mains pour la soif ; orge nue de la lumière. Charbon, oxyde de fer, pierre calcaire. Qu'est-ce qu'une forme ? Ça devrait pouvoir s'entendre.

Nous n'avons pas commencé, le dessin n'a pas commencé. Nous sommes à peine réveillés que le jour déjà se détache de la lumière, créant un retard. Lumière qui, elle, n'avait pas fléchit. Sans haut ni bas, sans droite ni gauche. Lumière qui avec la distance parcourue crée un effet fossile. Quelque chose de matinal, se fait entendre mais seulement parce que nos facultés expriment un retard à soi. Chaque couleur, chaque aspect ou trait dévoilant les choses par degrés, nous laisse aux aguets, en lisières. Hors


Chaque couleur, chaque ombre est réponse. Amplitude. Renvoi... Mais nous ne sommes pas prêts. C'est à peine si une sensation s'accorde à la suivant, nous prêtons secours, nous inventons. Quelqu'un nous l'avait dit : sans invention, rien ne serait à sa place. Qu'est-ce qu'une forme ? Ça devrait d'entendre. Cet instant où la pluie de printemps cesse et de ce qui cesse s'entend ce qui reste. Le jour s'écarte du monde, le devance, le troue. La durée apparaît — se déploie, porte à reconnaissance l'esquisse. Le silence saisi la clarté, car la pluie aura lavé l'air, pour s'épancher. Aux premiers pas autour du lac, on voyait l'eau copier le vent avec la calligraphie des branches. Vert vent. Vertes branches. Un léger bruitage, rendait sensible le calme. Il revient à chacun de ne pas céder sur l'espace.

Après la pluie, les distances ne sont pas perçus de la même façon. Une proximité s'y ajoute avec le regain de clarté. Dans le jardin d'entrée, l'air, lavé, nous devance, nous y invite. Comme si chaque feuille pouvait se séparer des autres, créer une proximité infinie, si bien que la matière serait le pur écart. L'intervalle entre 0 et 1 serait une vague insinuation à ce propos. Notre seule chance, c'est de nous avoir rencontré, dira-t-elle. Nous avons tissé. Maintenant un poème nous apprend à lire parmi les choses du commun. Il lui dit — tu es comme la générosité de l'herbe que l'ombre des arbres transforme en dallage, tu t'y perdrais. Bifurcations.

Bifurcations à l'insu. Ces instants privilégiés où la simple retenue sert d’appât. Regarder n'est pas saisir mais s'effacer. Seul le passage est vrai...

Il arrive que nous ayons d'autres dispositions pour penser ou parler que l'acte de différer dans la marche. Paysages, couleur, aspects. Hasard dont nous sommes. Le silence après la pluie — l'horizon dans un bâton de pluie... Le dessin appartient à cette lignée d'actes épars, insulaires. Il ne se comprends que dans l'espace de sa réserve. Il n'est pas sommation. Il ne se rencontre que qu'après l'averse... Il revient à chacun(e) de ne pas céder sur l'espace.

Aristote : Physique, II, 8, § 6, 199a15 « D’une manière générale, l’art, dans certains cas parachève ce que la nature n’a pas la puissance d’accomplir, dans d’autres cas il imite la nature.»


J'appelle les amants!

15 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page